Pour observer l’évolution des pratiques sexuelles de nos contemporains, on ne dispose que de peu de matériaux, autres que l’observation clinique ou les quelques enquêtes parfois diffusées (ayant uniquement valeur indicative).
Les études concernant la sexualité, à l’instar du Rapport Kinsey, des recherches de Masters et Johnson ou des rapports Hite, ne sont pas légions, le focus étant aujourd’hui principalement mis sur la recherche médicale dans ce domaine.
A l’occasion de la publication de « cinquante nuances de Grey », roman vendu à plus de 40 millions d’exemplaires dans le monde, le journal Femme Actuelle a commandé auprès du très sérieux institut de sondage IFOP, une étude relative au phénomène « Mummy Porn » dans l’hexagone.
Ce terme anglo-saxon, véhiculé par les médias, vient d’être intégré au dictionnaire Collins (excusez du peu) et se définit comme « a genre of erotic fiction designed to appeal to women », que l’on pourrait traduire par « un genre de fiction érotique conçu pour plaire aux femmes ». La traduction littérale est, elle, plus « trash » : « le porno pour maman ».
L’auteur, Mrs E. L. James, sujet de sa Royale Majesté, réfute dans les médias le caractère pornographique de sa prose, la qualifiant de « provocative romance ».
Le nouvel observateur, en octobre 2012, eut l’idée de demander à un célèbre producteur de films X, Marc Dorcel, que l’on ne présente plus, ce qu’il pensait de ce roman. Ses réponses furent pour le moins explicites : « …C’est un hymne à la jouissance pour femmes frustrées, dirons-nous. Une sorte de conte de fées vaguement sadomaso, qui invite à se familiariser avec certaines pratiques sexuelles. Il y a un côté positif: il encourage les femmes à accéder à une sexualité sans tabou. Mais il plaira principalement en tant que roman d’amour… ».
Dés lors, on comprendra aisément le schisme entre les genres…
Toutefois, Il faut bien avouer que jusqu’ici, la pornographie se destinait principalement aux hommes. Les lectures destinées aux femmes, quant à elles, ne présentaient que peu de contenu sexuel explicite.
Aujourd’hui, ce type de littérature évolue en devenant « transgressive », participant à l’érotisation générale de la société, observable dans les médias : TV, presse, cinéma, internet, publicité, mode…
Difficile d’y échapper. On n’a jamais autant parlé de sexe qu’aujourd’hui.
Même s’il est louable de vouloir attiser le désir et de pimenter sa relation de couple, il n’en demeure pas moins qu’ il y a risque à ce que ces modèles proposés deviennent des modèles imposés, provoquant l’inverse de l’effet désiré.
Aujourd’hui, nombre de sexothérapeutes reçoivent dans leurs cabinets des consultants qui s’interrogent, se comparent aux images véhiculées, recherchant ce que pourrait être «la normalité».
Nous vivons dans une société où la qualité des rapports sexuels cède le pas à la quantité, voire à la transgression à marche forcée.
C’est tout du moins la norme que l’on tente de nous introjecter. Il appartient à chacun de librement se positionner et d’évoluer à son rythme, en se respectant et en respectant l’autre.
Le décor étant planté, que révèle l’étude de l’IFOP sur nos contemporains ?
Les grandes lignes directrices de cette étude indiquent que :
– La diffusion et la banalisation de l’usage des sextoys dans la population française est spectaculaire, Depuis une demi-douzaine d’années, l’usage des sextoys s’est largement banalisé. Aujourd’hui, plus d’une femme sur trois (38%) admet en avoir déjà utilisé, contre à peine 14% en 2009 et 7% en 2007.
– De manière générale, les Françaises se montrent assez ouvertes aux différentes expériences susceptibles de mettre un peu de piment dans leur vie de couple. Ainsi, plus d’une femme sur deux (51%) serait tentée de faire l’amour dans un lieu public (ascenseur, toilettes, parc…).
– Si la majeure partie des femmes souhaite réaliser ses fantasmes les plus torrides avec son compagnon actuel, une proportion non négligeable n’en reste pas moins excitée en s’imaginant faire l’amour avec un autre partenaire,
– Une proportion importante de femmes se dit ouverte à la plupart des pratiques sexuelles réalisables au sein d’un couple mais rares sont celles qui sont prêtes à se soumettre à tous les désirs de leur compagnon,
– La consommation de livres érotiques est largement répandue au sein d’une population féminine qui a un rapport plutôt décomplexé à ce type de lecture. près de six femmes sur dix (59%) admettent avoir déjà lu un livre érotique au cours de leur vie, contre un peu plus d’une sur trois en 1970 (38%).
– Etc.
Je vous invite à regarder dans le détail cette étude, librement accessible par le lien que j’ai positionné en fin d’article.
Il est évident que le « mummy porn » s’inscrit dans le mouvement d’érotisation global de la société et l’accompagne. Il est également intéressant d’observer que même si ce type de sondage créée un tropisme, l’étude confirme incontestablement que le premier organe sexuel, chez l’homme comme chez la femme, s’appelle le cerveau.
Alors, à nous de laisser libre cours à notre imaginaire.
Pour en savoir plus :
Le site internet de E.L. James : http://www.eljamesauthor.com
L’étude complète de l’IFOP : http://www.ifop.fr/media/poll/2094-1-study_file.pdf
Nota Bene :
Cette étude a été réalisée par internet du 30 novembre au 3 décembre 2012 auprès d’un échantillon de 1 008 femmes, représentatif de la population féminine française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (âge, profession de la personne interrogée) après stratification par région et catégorie d’agglomération.